Prévue initialement en 2021, la CAN a été reportée d'un an à cause de la pandémie. Le maintien du tournoi faisait l'objet de certaines inquiétudes au regard de l'explosion du nombre de cas de Covid-19, causée par le très contagieux variant Omicron. Certains soulignaient un retard dans la construction des infrastructures, tandis que d’autres redoutaient la violence dans certaines régions du Cameroun. Au premier rang des opposants à l’organisation de la CAN, figure la coalition FIFA-ECA.
La FIFA et l’ECA, main dans la main contre la CAN
Le 10 Décembre 2021, l'Association européenne des clubs (ECA) a écrit à la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) pour lui faire part de ses « profondes inquiétudes » concernant la Coupe d'Afrique des Nations et menacer de ne pas libérer les internationaux africains.
Le courrier de l'ECA a indiqué que : « Le conseil d'administration a convenu de s'engager de toute urgence avec la FIFA pour s'assurer que toutes les précautions nécessaires sont en place pour protéger les joueurs et les intérêts des clubs alors que la situation sanitaire continue de se détériorer de manière alarmante. »
Sans surprise, Gianni Infantino, président de la FIFA, a mis tout son poids dans la balance pour la possible annulation de la 33e édition de la CAN. Le patron du football mondial s’érige en défenseur de la santé des joueurs et des intérêts du football africain mais la volonté de s’attaquer à la CAN s’inscrit dans une logique essentiellement économique. La première priorité de la FIFA est le bon déroulement de la Coupe du monde des clubs, qui se jouera aux Emirats Arabes Unis, du 3 au 12 février 2022, soit trois jours avant la fin de la Coupe d’Afrique des Nations. Question d’argent, sûrement. Le projet de Gianni Infantino, pour les années à venir, est d’inverser le calendrier avec une CAN tous les quatre ans et une coupe du monde tous les deux ans. Pour le bien du football africain, sûrement pas.
« La CAN, ce monstre invisible” !
À la question de savoir si les organisateurs auraient dû envisager de reporter le tournoi, l'entraîneur de Naples, Luciano Spalletti, a répondu qu'il n'avait pas le pouvoir institutionnel de prendre la décision, mais qu'il espérait que le bon sens prévaudra.
Le manager italien est mécontent du calendrier de la compétition et il n’a pas mâché ses mots : « Il faut penser à gagner des matchs sans regarder ce que font les autres, le championnat est encore très long. Et puis il y a ce monstre invisible de la Coupe d'Afrique qui est là, derrière. Il fait disparaître les joueurs des vestiaires et vous ne savez pas quand vous allez les retrouver ; nous en avons quatre et ils sont fondamentaux pour notre équipe », a-t-il souligné.
Les quatre joueurs de Naples concernés par la CAN sont : Kalidou Koulibaly (Sénégal), Adam Ounas (Algérie), André Frank Zambo Anguissa (Cameroun) et Victor Osimhen (Nigeria), finalement forfait pour le tournoi car il est testé positif au Covid.
Ce n'est plus une nouvelle, l'appréhension grandit chez les entraîneurs des équipes européennes à l’approche de chaque Coupe d’Afrique des Nations. Les managers n’hésitent pas à s’attaquer frontalement au tournoi, quitte à manquer de respect à tout un continent.
« La couverture (de la CAN) est complètement teintée de racisme »
L'ancien attaquant des Three Lions Ian Wright s'est révolté contre la couverture « teintée de racisme » de la Coupe d'Afrique des Nations.
Dans une vidéo publiée sur son compte Instagram officiel, la légende d'Arsenal a déclaré : « Je dois demander à certaines personnes : y a-t-il un tournoi plus méprisé que la Coupe d'Afrique des Nations ?»
Très remonté, Ian Wright a comparé la différence de traitement entre les joueurs africains et européens, « On demande aux joueurs s'ils vont honorer les convocations de leur équipe nationale. » Souligne-t-il. « Avez-vous déjà entendu quelqu'un demander à un joueur anglais s'il allait honorer une convocation ? Pouvez-vous imaginer le scandale ? » Poursuit-il, avant de saluer la prise de position de l’attaquant ivoiriens Sébastien Haller et de l'entraîneur de Crystal Palace Patrick Vieira, né au Sénégal. « Il est important d’avoir un manager noir qui puisse faire comprendre aux gens où sont ses origines et à quel point ce tournoi est important pour les Africains », a notamment ajouté le consultant pour la BBC.
Les commentaires de Wright sont intervenus alors que les joueurs sélectionnés par leur pays pour la compétition au Cameroun, font face notamment à des pressions médiatiques.
Interrogé par le média néerlandais De Telegraaf, Sébastien Haller n'a pas apprécié qu'on lui demande s'il préférait rester avec l’Ajax Amsterdam plutôt que de rejoindre les Éléphants de Côte d’Ivoire au Cameroun. « Cette question montre le manque de respect pour l’Afrique. Aurait-on posé cette question à un joueur européen avant l’Euro ? Bien sûr que je fais la CAN », a déclaré l’actuel meilleur buteur de la Ligue des champions.
L’entraineur français du club anglais Crystal Palace, Patrick Vieira, avait auparavant lancé un appel similaire au respect du tournoi. « Je n'empêcherai jamais un joueur de prendre part à la compétition. Je crois que ce tournoi doit être plus respecté. Il est aussi important que l'Euro », a annoncé l’ancien champion du monde 98 en conférence de presse. Pour rappel, les Eagles vont devoir se passer de l’ivoirien Wilfried Zaha, du ghanéen Jordan Ayew et du sénégalais Cheikhou Kouyaté, sélectionnés avec leur équipe nationale respective pour le CAN.
Levée de boucliers des acteurs du football africains face aux attaques contre la CAN
À l’heure où les flèches contre la CAN arrivent du côté européen, les acteurs du football africain font front commun pour défendre la plus importante compétition africaine de football.
Le nouveau président de la Fédération camerounaise de football, Samuel Eto’o, s’est placé à la tête de l’offensive africaine pour défendre le maintien du tournoi. « Pourquoi la Coupe d’Afrique des nations ne se jouerait-elle pas ? Donnez-moi une seule raison valable ! s’était indigné le meilleur buteur de l’histoire de la CAN, le 21 décembre dernier. On est en train de nous traiter comme on nous a toujours traités : nous sommes des moins que rien et nous devons toujours subir. »
L'ancien milieu offensif égyptien, Mohamed Aboutrika, a accusé la FIFA de mépriser le football africain. « Je suis désolé de dire qu’ils (la FIFA) traitent le continent africain avec mépris », a déclaré l’actuel consultant pour la version arabe de beIN SPORTS. Le double vainqueur de la CAN a critiqué les pressions exercées par la FIFA sur la Confédération africaine de football (CAF) avant le début de la Coupe d'Afrique au Cameroun.
Les propos de l’ancienne star d'Al-Ahly du Caire sur l'une des émissions de la chaîne qatarie, mercredi 29 décembre 2021, interviennent après la décision de la FIFA d'autoriser aux clubs européens de conserver leurs joueurs professionnels africains jusqu'au 3 janvier. Une compensation puisque l'Association européenne des clubs (ECA) n’a pas obtenu l’annulation de la CAN. Le sélectionneur de l'Algérie, Djamel Belmadi regrette le choix de la FIFA, « Deux choses compliquent énormément notre préparation : la pandémie de Covid-19 et la décision de la FIFA concernant la libération des joueurs européens le 3 janvier », a affirmé Djamel Belmadi en conférence de presse.
De son côté Vahid Halilhodzic, a taclé le Barça et la FIFA en évoquant le cas du jeune attaquant Abdessamad Ezzalzouli, qui a décliné la convocation du Maroc, sous la pression du club catalan et des médias espagnols. « Je pense que le FC Barcelone pose problème, car il ne respecte pas assez la Coupe d'Afrique des nations. Les grands clubs européens et la FIFA ne la respectent tout simplement pas assez », a déclaré le sélectionneur des Lions de l’Atlas.
Malgré les vents contraires qui soufflent depuis des semaines sur l’organisation de la CAN, les amoureux du football africain brûlent d'impatience pour suivre la reine des compétitions africaines et les superstars mondiales à l’image de Salah, Mané et Mahrez.
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